Lancet oncology

Quel est l’effet des corticoïdes à hautes doses sur les dyspnées d’origine cancéreuse ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
octobre 2022

Qualité de vie / Soins palliatifs

La dyspnée est un symptôme très fréquent chez le patients qui ont une tumeur avancée puisqu’elle est présente dans 70% des cas. Les auteurs de cette étude nous disent que c’est parce que  les marqueurs de l’inflammation sont corrélés à la dyspnée que les corticoïdes sont très fréquemment prescrits à ces malades atteints de cancer dans un but palliatif. Ils sont même quasi systématiquement  prescrits au Japon ou une enquête récente a montré que 98% des médecins de soins palliatifs proposaient ce traitement. Pourtant il n’y a pas d’études randomisées de qualité sur ce sujet et le Groupe Cochrane, considérant que cette  question reste totalement non résolue suggère que des études de qualité soient menées. 

L’étude dont les résultats viennent d’être publiés dans le Lancet Oncology est une étude randomisée en double aveugle dans la quelle les patients cancéreux atteints de dyspnée ont été randomisés. Cette étude était réalisée dans deux grands centres de Houston. Pour être inclus dans cette étude,  les patients devaient avoir un diagnostic de cancer quel qu’il soit, avoir plus de 18 ans, être pris en charge en ambulatoire, et présenter une dyspnée d’’intensité ≥4  sur une échelle numérique (NRS) allant de 0 à 10. 

Ils étaient randomisés sur le mode 2/1 et stratifiés, selon l’état basal de la dyspnée (4-6 vs 7-10) et le site de l’étude, pour recevoir :

  • Soit pendant les 7 premiers jours 2 capsules de 4 mg vers 8 et 16h de dexamethasone (soit au total 16 mg/j , ce qui correspond à un peu plus de 100 mg/j de prednisone)  puis Les 7 jours suivants une seule capsule de 4 mg de dexamethasone 2 fois par jour.
  • Soit le même nombre de capsules de placebo. 

L'objectif principal était le changement de l’intensité de la dyspnée d’au moins un point sur la NRS entre J0 et J7. Il y avait plusieurs objectifs secondaires dont le changement de J0 à J14, les modifications de scores de différents symptômes d’humeur et de qualité de vie  et les modifications spirométriques. 

Un total de 128 patients ont été randomisés, 85 dans le bras dexamethasone et 43 dans le bras placebo. Tous les participants avaient un envahissement thoracique et 65/85 et 27/43 avaient un cancer broncho-pulmonaire primitif. 

Le changement moyen d’intensité de la dyspnée sur la NRS dans le bras dexamethasone était de -1,6 (95%CI : -2 à -1,2) et de -1,6 (-2,3 à 0,9) dans le bras placebo. Cette différence n’était pas significative (0,0 (-0,8-0,7), p = 0,48. 

Il n’y avait également aucune différence significative à J14. En revanche, les patients du bras dexamethasone avaient un appétit significativement augmenté et une amélioration des scores de bien être mais ils avaient aussi une détérioration des scores d’anxiété et de dépression (Edmonton Symptom Assessment). Aucune différence significative des valeurs fonctionnelles n’était observée. 

Plus d’événements de grade ≥3  étaient documenté dans le bras expérimental (n= 45) que dans le bras placebo (n=7). Parmi ces événements de tous grades, il s’agissait principalement d’insomnies, de troubles psychiatriques, d’infections, de dyspepsie, d’œdèmes, de hoquet, de flush et de détresse respiratoire. Des effets adverses sévères conduisant à l’hospitalisation ont été rapportés chez 28% des patients du bras expérimental et 7% des patients du bras placebo. 

Cette étude n’a donc pas démontré de réduction significative de la dyspnée dans le bras expérimental comparé au bras standard ce qui ne veut pas dire que certains sous groupes de patients ne bénéficient pas de ce traitement. Il est clair  en tout  cas que tous les patients dyspnéiques ne doivent pas recevoir systématiquement des corticoïdes à hautes doses, surtout s’ ils peuvent être amenés à recevoir ultérieurement une immunothérapie car la diminution d’activité de l’immunothérapie liée à l’administration des corticoïdes a été démontrée dans plusieurs études rétrospectives commentées sur ce site (cliquer ici) (et ici) (et ici)

Reference


Effect of dexamethasone on dyspnoea in patients with cancer (ABCD): a parallel-group, double-blind, randomised, controlled trial 

Hui D, Puac V, Shelal Z, Dev R, Hanneman SK, Jennings K, Ma H, Urbauer DL, Shete S, Fossella F, Liao Z, Blumenschein G Jr, Chang JY, O'Reilly M, Gandhi SJ, Tsao A, Mahler DA, Bruera E.. 

Lancet Oncol 2022 Sep 7. Epub ahead of print

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Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer