Journal of Clinical Oncology

Transférer les soins en oncologie de l’hôpital au domicile ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
février 2019

Qualité de vie / Soins palliatifs, Relation avec le patient, Aspects médico-économiques

Le premier sentiment que peut avoir le lecteur qui lit cette controverse peut être le celui  de lire un article de science fiction tellement tout ce qui est décrit parait éloigné des réalités auxquelles les médecins français sont confrontés actuellement.

On comprend bien quelles sont les motivations d’une telle démarche 

Quelques chiffres la légitiment : dans l’année qui suit l’hospitalisation, près des ¾ des patients sont hospitalisés au moins une fois et un patient sur 6 au moins 3 hospitalisations. Ces hospitalisations sont en rapport avec des soins programmés (l’administration d’une chimiothérapie par exemple) ou non (un effet secondaire du traitement par exemple). 

On comprend bien aussi quels seraient les avantages d’une telle démarche 

Toutes ces hospitalisations sont couteuses, souvent mal vécues par les malades et administrer les même traitements et prodiguer les même soins au domicile en assurant la même surveillance qu’en ville n’aurait que des avantages. 

Et puis, à la lecture de cet article, on apprend que cette démarche n’est pas une fiction mais qu’elle a été entreprise depuis longtemps dans certains centres américains,  tels que le Johns Hopkins, - qui s’est engagé dans cette voie il y a plus de 20 ans, ou australiens-. On sait déjà, à partir de ces expériences que transférer l’hôpital à la ville permet de faire beaucoup de soins au domicile : administrer des chimiothérapies bien sûr, mais aussi gérer les complications de celle-ci (telle qu’une granulopénie fébrile sans signes de gravité par exemple) ou prendre en charge des soins palliatifs. On sait aussi que ces actions augmentent la satisfaction du patient et lui évitent le contact avec des germes nosocomiaux. On sait enfin, grâce à ces expériences, que  le nombre et la durée des hospitalisations classiques sont diminués ainsi que le nombre de réadmissions. 

Tout ceci aboutit à une diminution des coûts, l’hospitalisation classique devenant une exception. 

On trouve dans cet article en revanche assez peu de données sur la façon dont les soins sont administrées, la façon dont la surveillance est exercée et la façon dont les complications sont prises en charge. On voit que des infirmières viennent au domicile et qu’il en est de même des  médecins et qu’ils vont pouvoir maintenant s’aider de la télémédecine. Tout ceci sera fait pour le plus grand plaisir des patients qui recevront à domicile des soins de même qualité et  de l’hôpital qui pourra redistribuer les lits de patients et des payeurs qui dépenseront moins d’argent …

Mais cette vision n’est-elle pas trop optimiste ?

Le patient y verra-t-il toujours un bénéfice lorsqu’il vit seul ou peu entouré à son domicile, et que dans ce système il devra prendre en charge lui-même toutes les tâches d’une vie quotidienne difficile ou lorsque ses contacts avec le médecin ou l’infirmière se réduiront à une télé-consultation et à quelques échanges techniques avec l’infirmière ?  

L’hôpital pourra-t-il gérer correctement ce temps de travail médical supplémentaire, car il est sous doute plus efficace de travailler dans un seul hôpital de jour que d’aller au domicile des malades ?  Sera-t-on gérer une consultation spécialisée pour un effet secondaire inattendu ? A-t-on réfléchit qu’en retirant les patients « ambulatoires » de l’ensemble des patients pris en charge à l’hôpital  la charge de travail concernant les patients plus graves qui restent à la charge de l’hôpital sera forcément plus lourde ?

Le payeurs enfin pourront-ils prendre en charge une organisation lourde qui devra  forcément faire appel à plus de personnel pour faire fonctionner à la fois un hôpital prenant en charge des malades plus lourds et assurer des soins au domicile du patient ?

Toutes ces questions non résolues nous incitent à penser que l’hôpital  de jour spécialisé doit rester le modèle. Si déjà il existait partout et était organisé comme il doit l’être les malades bénéficieraient d’une meilleure prise en charge  et auraient moins souvent recours à une hospitalisation classique.  

 

 

 

Reference

The Oncology Hospital at Home.

Handley NR, Bekelman JE.

J Clin Oncol 2019; 37 : 448-452

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Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer