Plos One

Cellules tumorales circulantes et dépistage du cancer broncho-pulmonaire.

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
novembre 2014

Dépistage, Diagnostic précoce

La recherche de cellules tumorales circulantes (CTCs) est de plus en plus envisagée comme une technique de dépistage et l’article qui donne des résultats préliminaires de l’équipe niçoise de Paul Hofman et que publie PLOS ONE cette semaine a été largement commenté par la grande presse durant ce week end.

C’est une étude monocentrique qui porte sur 245 patients qui faisaient partie d’un groupe contrôle de patients inclus dans une grande étude prospective évaluant la fréquence des CTCs chez des patients opérés d’un cancer broncho-pulmonaire (de 2008 à 2012). Ce groupe contrôle comprenait 168 patients atteints de bronchopneumopathie chronique obstructive (BPC0) admis à l’hôpital, 42 fumeurs sans pathologie détectable et 35 sujets sains non fumeurs.

La détection de CTCs a été réalisée par la technologie ISET (Isolation by Size of Epithelial Tumor cells). Tous les patients atteints de BPCO ont bénéficié d’un scanner thoracique à faible dose initial puis annuel.

Résultats

Chez 5 des 168 patients atteints de BPCO (3%) des CTCs ont été détectés. Ils en avaient entre 19 et 67 et certains avaient des clusters de cellules tumorales.   

La présence de CTCs était corrélée à la gravité de la BPCO. Deux patients avaient un score de GOLD à 2, les 3 autres avaient un score de GOLD à 3.  Chez ces 5 patients un cancer broncho-pulmonaire (4 adénocarcinomes et 1 épidermoïde) a été diagnostiqué ente 1 et 4 ans après la découverte de CTCs. Ces 5 cancers étaient de petite taille (14 à 20 mm) et tous étaient de stade IA.

Tous ont été opérés et n’ont pas récidivé à 16 mois après la chirurgie.

Chez aucun autre patient atteint de BPCO ou non, un nodule ou a fortiori un cancer n’a été détecté. Chez trois des 168 patients atteints de BPCO,  des cellules ont été également détectées, mais qui n’avaient pas de caractère cytologique suspect.  

 

Cette très importante étude apporte des résultats particulièrement intéressant conduisant à plusieurs commentaires et à plusieurs questions.

Le premier point à souligner est qu’il s’agit d’une étude très préliminaire à petits effectifs (5 malades atteints de cancer au total) et monocentrique. Les auteurs ne précisent pas si ces malades "contrôles" d’une autre étude ont tous été consécutivement inclus de sorte qu’il est probable que seulement  certains l’ont été, ce qui peut constituer un biais important.

Le deuxième point est que cette technique ne peut être en aucun cas, dans l’état actuel des choses, proposée comme une technique de dépistage. Par définition le dépistage ne s’adresse pas à des malades mais à des sujets sains qui n’ont aucun symptôme. Ici il s’agissait bien de malades et même de malades qui ont été admis en hospitalisation. Ils étaient donc symptomatiques. Dans le même temps, cette recherche a été négative chez  les 77 sujets sains fumeurs ou non.

Le troisième point est que le choix de sujets atteints de bronchite chronique, s’il peut paraître légitime parce que le cancer est fréquent chez ces malades, est discutable car ces malades ne sont pas les meilleurs candidats à la chirurgie thoracique, souvent du fait de la dégradation de leur fonction respiratoire et de leurs comorbidités. De plus, la BPCO elle-même est une cause de mortalité. Ceci est d’autant plus ennuyeux que la présence de CTCs était corrélée à la gravité de la BPCO. Les 2 patients qui avaient un score de GOLD à 2, et les 3 autres qui avaient un score de GOLD à 3 ont, - du fait même de leur seule BPCO – une mortalité respectivement de 5,9% et 14,3% à 3 ans (http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/22997207). Il ne nous semble pas que, de ce fait, ils soient la cible idéale pour un dépistage.

Le dernier point enfin concerne le fait que détecter des CTCs plusieurs années avant un cancer peut être particulièrement angoissant pour un malade qui saurait qu’il a un cancer mais serait condamné à n’être l’objet que d’une surveillance scanographique.

Il n’en reste pas moins que cette voie de recherche reste extrêmement intéressante. Elle devrait, nous semble t-il explorer spécifiquement des sujets sains fumeurs dans un but de dépistage au vrai sens du terme, ou être couplée au scanner pour  aider à différencier les vrais des faux positifs.  

Reference

"Sentinel" Circulating Tumor Cells Allow Early Diagnosis of Lung Cancer in Patients with Chronic Obstructive Pulmonary Disease.

Ilie M1, Hofman V1, Long-Mira E2, Selva E3, Vignaud JM4, Padovani B5, Mouroux J6, Marquette CH7, Hofman P1.

PLoS One 2014; 9 : e111597.

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