Journal of the National Cancer Institute

Dépister à moins de 30 paquets/année (PA) ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
octobre 2015

Dépistage, Diagnostic précoce

Les recommandations de l’United States Preventive Services Task Force (USPSTF), comme celles de la plupart des Sociétés nord américaines sont de proposer  un dépistage annuel chez les adultes de 55 à 80 ans,  qui ont fumé au moins 30 PA, qui sont encore fumeurs ou qui, s’ils ont arrêté, l’on fait depuis moins de 15 ans (/suicide-et-cancer-broncho-pulmonaire-ou-mesotheliome). Ces critères découlent du fait que c’est pour cette population que l’intérêt du dépistage scanographique a été démontré.  En revanche le National Comprehensive Cancer Network (NCCN) élargit cette recommandation aux personnes qui ont fumé 20 PA, s’ils ont un autre facteur de risque tel qu’un facteur professionnel. Ce chiffre de 20 PA  est arbitraire.

Les auteurs de ce travail s’appuient sur la notion qu’il y a une importante chute du risque chez les anciens fumeurs entre 10 et 15 ans après l’arrêt pour faire l’hypothèse que des fumeurs de 20 à 30 PA ont un risque supérieur à celui d’un ancien fumeur qui s’est arrêté depuis longtemps.

Pour vérifier cette hypothèse les auteurs ont travaillé à partir des données du PLCO (/prev-em-onco/2343), essai randomisé comparant la radiographie pulmonaire à aucun dépistage, qui n’avait pas le tabac comme critère d’inclusion. Ils ont utilisé un modèle de Cox pour chiffrer la relation entre le tabagisme et le risque  de cancer. Plusieurs catégories ont été définies :

-       Non fumeurs

-       fumeurs de plus de 30 PA,

-       fumeurs de 20 à 30 PA,

-       anciens fumeurs de plus de 30 PA et ayant arrêté depuis moins de 15 ans. Sur les 154 899 sujet randomisés, 148 051 (95,6 %) ont répondu complètement au questionnaire concernant le tabac.

Les résultats de ce modèle de Cox sont indiqués dans le tableau ci dessous :

Personnes à risque/an

Cancers/10000/an

HR[1]

Non fumeurs

779 504

3,2

1

Fumeurs ≥30 PA

36 312

74,6

29,9

Fumeurs de 20 à 30 PA

6 633

54,3

17,8

Anciens fumeurs ≥30 PA, arrêt < 15 ans

71 833

46,4

16,6

On voit sur ce tableau que les anciens fumeurs de 30 PA ont un risque inférieur à celui des fumeurs de 20 PA.

A partir de l’enquête National Health Interview Survey (NHIS) conduite pour définir le nombre de personnes qui seraient éligibles au dépistage selon les critères de l’USPSTF aux USA, les auteurs de cette étude estiment que ce nombre passerait de 10 à 11,6 millions de personnes si cette population était ajoutée. Ce groupe comporterait une surreprésentation des femmes et des minorités raciales. L’évaluation des bénéfices et inconvénients du dépistage dans cette population doit donc être effectuée.

On réalise une fois encore, à la lecture de cette étude combien les données dont nous disposons actuellement sont complexes. A partir d’un modèle, les auteurs parviennent à parfaitement démontrer que le dépistage serait au moins aussi utile dans une population de fumeurs de 20 à 30 PA que dans une population d’anciens fumeurs de plus de 30 PA qui auraient cessé leur tabagisme  depuis moins de 15 ans. C’est une indication qui nous fournit un nouvel axe de recherche mais ce n’est que cela, car rien ne nous permet de penser que les fumeurs de 20 à 30 PA auront une adhésion au dépistage identique à celle des anciens fumeurs et que ceux-ci s’arrêteront de fumer dans la même proportion que les fumeurs de plus de 30PA. Et puis le problèmes est encore plus complexe car ce n’est pas les mêmes profils de malades : ce sont plus souvent des femmes et ils n’ont pas la même origine.  Ainsi, avant de décider d‘étendre au 20-30 PA l’indication du dépistage scanographique, une étude randomisée menée dans cette population serait nécessaire.  



[1] Tenant compte de l’âge et du sexe.

Reference

Lung Cancer Risk and Demographic Characteristics of Current 20-29 Pack-year Smokers: Implications for Screening.

Pinsky PF, Kramer BS.

J Natl Cancer Inst 2015; 107 (11)  

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Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer