Journal of Thoracic Oncology

Comment doit-on sélectionner les patients qui doivent recevoir du crizotinib ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
mars 2014

Thérapeutique ciblée, Biomarqueurs / Facteurs pronostiques et/ou prédictifs

La technique FISH est pour la recherche de translocations ALK-EML4 le test de référence, mais c’est un test qu’il n’est pas facile de réaliser en routine à grande échelle.

De ce fait, beaucoup d’équipes ont proposé de sélectionner les patients qui doivent bénéficier de ce test en s’aidant du profil clinique,  du résultats des autres mutations, notamment EGFR et l’ immunohistochimie (/paclitaxel-et-carboplatine-un-autre-standard-de-chimiotherapie-adjuvante, /prev-em-onco/2637, /la-chimiotherapie-de-deuxieme-ligne-prolonge-t-elle-la-survie). 

Cet article français porte sur un nombre très important de tumeurs (n=3244) examinées à la fois par immunohistochimie et FISH à Rennes et à Bordeaux dans le but de mieux définir la concordance entre ces deux techniques.

Au total 150 patients (4,6%) ont été classés « ALK positifs » en immunohistochimie et/ou FISH. La moyenne d’âge de ces patients n’était pas significativement différente de celle du reste de la cohorte, en revanche il y avait plus de femmes ALK positives que dans le reste de la cohorte.  La grande majorité des tumeurs étaient des adénocarcinomes.

En FISH, 116 réarrangements ALK ont été identifiés (3,6%) et 114 immunohistochimie ont été positives (3,5%).

Seulement 80 (53%) prélèvements étaient simultanément FISH et immunohistochimie positifs. Chez ces 80 malades, l’immunohistochimie était le plus souvent intense à 2 ou 3+ mais il n’y avait pas de corrélation entre le pourcentage de cellules avec réarrangement ALK et l’intensité de l’immunohistochimie.

Le tableau ci-dessous résume les résultats pour les 3244 patients :

 

FISH

 

 

 

IHC

 

Positive

Négative

Non contributive

Total

Positive

80

19

15

114

Négative

36

2579

435

3050

Non contributive

0

49

31

80

Total

116

2647

481

3244

Il y a donc dans cette série pas mal de discordances avec :

-       36 cas FISH positive et immunohistochimie négative,

-       19 cas immunohistochimie positive et FISH négative

-       et 15 cas immunohistochimie positive et FISH indéterminée.

 

Ces 70 cas décelés dans une série très importante posent problème. Pour l’instant en tout cas, il semble bien qu’il faille continuer à effectuer les 2 techniques. En effet, si on commence par l’immunohistochimie et  que celle-ci est négative, on ne peut pas se permette d’ignorer que 36 seront FISH positifs. Si, à l’inverse elle est positive, peut-on se permettre de traiter par crizotinib les 19 qui seront FISH négatifs ? Pour répondre à cette question, il faudrait connaître l’évolution de ces malades sous crizotinib. 


Cet article, qui montre des discordances nombreuses entre l’immunohistochimie (IHC) et la FISH, peut susciter plusieurs commentaires.

Ces discordances proviennent probablement en partie d'une hétérogénéité dans les techniques de préparation des prélèvements, dite « phase pré-analytique » : les résultats discordants proviennent ils plus fréquemment de laboratoire d'anatomopathologie hors de la plateforme, de prélèvements plus anciens ou de prélèvements dont la fixation a été fait le week end ?

On note dans cette étude une proportion non négligeable de doubles altérations génétiques EGFR ou KRAS et ALK. Il est à souligner que c'est dans la partie basse des tableaux (c'est à dire les lignes avec discordances IHC/FISH) que sont retrouvées ces mutations KRAS et EGFR. Il est donc possible qu’il s'agisse de deux contingents tumoraux différents.

Enfin, on peut penser qu’il est dommage que peu de cas de malades ALK dissociés aient été exposés au crizotinib et que les cas discordants des deux centres n'aient pas été à nouveau testés dans l'autre centre à partir d'une nouvelle technique.

Cet article intéressant souligne en tout cas qu’il est nécessaire de maintenir une approche double mais non exclusive :

- l’IHC doit être réalisée d'emblée et confirmée avant traitement par FISH si elle est positive.

- Par ailleurs, chez les malades négatifs en IHC qui présentent des critères prédictifs de réarrangement de ALK (adénocarcinome, non ou ancien petits fumeurs, doubles négatifs EGFR, KRAS),  il faut pratiquer une FISH de rattrapage.

 

Pr Jacques Cadranel

Chef du Service de Pneumologie

Hôpital Tenon, 4 rue de la Chine, Paris 75970

Reference

Parallel FISH and Immunohistochemical Studies of ALK Status in 3244 Non-Small-Cell Lung Cancers Reveal Major Discordances.

Cabillic F, Gros A, Dugay F, Begueret H, Mesturoux L, Chiforeanu DC, Dufrenot L, Jauffret V, Dachary D, Corre R, Lespagnol A, Soler G, Dagher J, Catros V, Le Calve M, Merlio JP, Belaud-Rotureau MA.

J Thorac Oncol 2014; 9 : 295-306.

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