Journal of Thoracic Oncology

Faut-il administrer après radiochimiothérapie du durvalumab en maintenance aux patients atteints de CBNPC de stades III mutés EGFR ? De nouveaux résultats.

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
juin 2021

Immunothérapie, Radiothérapie / Radiofréquence, Traitement des stades III, EGFR

A la suite des résultats de l’étude PACIFIC (cliquer ici) (et ici)  (et ici), le traitement des cancers bronchiques non à petites cellules de stades III non résécables dont la tumeur exprime PD-L1  est la radiochimiothérapie suivie par une immunochimiothérapie de consolidation. 

Mais chez les patients dont le cancer bronchique non à petites cellules est métastatique et qui ont des mutations activatrices de l'EGFR, l’immunothérapie n’est pas indiquée. Qu’en est-il alors dans les stades III ? Dans l’étude PACIFIC seulement 6% des malades avaient des mutations de l'EGFR et les HR de survie sans progression et de survie globale de ce petit sous-groupe de patients ne sont pas significatifs. En l’absence de démonstration, on pourrait donc laisser le choix à chacun de prescrire  ou non le durvalumab en traitement de maintenance à ces malades mais la question se pose particulièrement depuis qu’on sait depuis les résultats de l’étude TATTON (cliquer ici) que l’administration d’osimertinib et de durvalumab s’accompagne d’un excès de toxicité 

Alors faut-il ou non proposer à ces patients une immunothérapie de consolidation chez ces malades qui pour beaucoup vont recevoir après un bref intervalle de l’osimertinib ? 

Pour répondre à cette question les auteurs de ce travail ont mené une étude rétrospective de 2017 à 2020 dans 4 institutions américaines, visant à analyser les données de tous les  patient qui présentaient un cancer bronchique non à petites cellules de stade III non résécable avec mutation de l’EGFR et traités par une radiochimiothérapie. Ils ont été considérés comme recevant du durvalumab dans la mesure où ils en avaient reçu au moins une injection après la radiochimiothérapie. 

Trente sept patients répondant à ce critère ont été analysés, dont 13 ont reçu du durvalumab et 24 n’en ont pas reçu. Les caractéristiques des patients des deux groupes étaient bien réparties à l’exception du sexe et de l’origine ethnique : les patients qui n’ont pas reçu de durvalumab étaient plus souvent des femmes et des caucasiens. 

Les 13 patients qui ont reçu une consolidation par durvalumab ont reçu ce traitement après un délai médian de 20 jours après la fin de la radiothérapie. Ils ont reçu un nombre médian de six cycles et 2 seulement ont reçu 12 mois de ce traitement. Douze d’entre eux étaient évaluables pour la toxicité et tous ont eu des effets adverses dont 6 effets adverses immunologiques sévères nécessitant l’hospitalisation (dont 3 pneumopathies (grades 2, 3, 3) , une myocardite (grade 3), une hépatite (grade 2) et une colite (grade3).

Parmi les 24 patients qui n’ont pas reçu de durvalumab 8 ont reçu un inhibiteur de la tyrosine kinase, 4  avant et 4 après la radiochimiothérapie. 

Avec un durée médiane de suivi de 21,8 mois la survie sans progression médiane des patients qui ont reçu une radiochimiothérapie et durvalumab était de 10,3 mois versus 22.8 mois chez ceux qui n’ont pas reçu de durvalumab, mais qui ont reçu un inhibiteur de la tyrosine kinase pour une bonne partie d’entre eux (HR = 1,78, 95% CI: 0,76–4,16, p = 0,180). Lorsqu’on examine la survie sans progression des patients qui ont reçu une radiochimiothérapie et un inhibiteur de la tyrosine kinase de l’EGFR la survie sans progression médiane à 26,1 mois était significativement augmentée. 

Les 6 patients qui ont progressé sous radiochimiothérapie plus durvalumab ont tous reçu un inhibiteur de la tyrosine kinase (5 osimertinib et 1 erlotinib) : 1 patient, qui avait eu une pneumopathie de grade 3 sous durvalumab, a eu une pneumopathie de grade 4, 17 jours après le début de l’osimertinib. Il avait pourtant eu un intervalle de 20 jours entre le durvalumab et l’osimertinib.  

Les résultats de cette étude rétrospective sont à rapprocher d’une autre étude monocentrique rétrospective très récente publiée par plusieurs des auteurs de cet article dans le même journal il y a un mois et discutée il y a peu de temps sur ce site  (cliquer ici)

On ignore si les 37 malades dont les données sont utilisées dans cette étude multicentrique comprennent ou non celles des 11 malades mutés EGFR de l’étude monocentrique citée plus haut.   Quoiqu’il en soit, cette nouvelle étude multicentrique apporte de nouveaux arguments pour penser que l’administration de durvalumab après une radiochimiothérapie serait moins efficace chez les patients EGFR mutés mais surtout majorerait la toxicité de l’osimertinib que recevront une bonne proportion de patients dans un deuxième temps.  

Certes, il s’agit d’une étude rétrospective ce qui rend ces résultats (notamment la mesure de la PFS et de la toxicité) fragiles. Néanmoins nous pensons que ces résultats devraient nous inciter, en attendant de nouvelles données, à ne pas proposer pour l’instant de maintenance par durvalumab à ces patients. 

Reference

Durvalumab for Stage III EGFR-Mutated NSCLC After Definitive Chemoradiotherapy.

Aredo JV, Mambetsariev I, Hellyer JA, Amini A, Neal JW, Padda SK, McCoach CE, Riess JW, Cabebe EC, Naidoo J, Abuali T, Salgia R, Loo BW Jr, Diehn M, Han SS, Wakelee HA.

J Thorac Oncol 2021; 16 : 1030-1041

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Revue : British Journal of Cancer