Journal of Clinical Oncology

Faut-il associer l’ipilimumab au pembrolizumab chez les malades traités en première ligne pour un CBNPC métastatique : résultats de l’étude KEYNOTE-598

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
février 2021

Immunothérapie

En octobre 2016 nous commentions sur ce site les premiers résultats de l’étude de phase III KEYNOTE-024, qui comparait en première ligne, - chez des patients présentant un cancer bronchique non à petites cellules sans mutation activatrice de l’EGFR  ni translocation ALK-EML4, ayant un PS à 0 ou 1 et un score PDL1 d’au moins 50% et sans métastases cérébrales non pré-traitées – , une immunothérapie par pembrolizumab à une chimiothérapie. La survie sans progression médiane était à 10,3 mois dans le bras immunothérapie vs 6 mois dans le bras chimiothérapie et les données de survie n’étaient pas matures (cliquer ici). Une actualisation des résultats a été publiée 3 ans plus tard (cliquer ici) : en dépit d’un crossover important il existait un important et significatif bénéfice de survie avec une survie médiane de 30 mois sous pembrolizumab et de 14,2 mois sous chimiothérapie (HR 0,63 (0,47-0,86), p = 0 ,002) et ce bénéfice était observé dans tous les sous-groupes. Néanmoins, même dans le bras immunothérapie près de 50% des patients étaient décédés à 2 ans ce qui bien sûr rend nécessaire la recherche d’une amélioration de ces résultats et l’association d’une immunothérapie au pembrolizumab était l’un des axes de recherche possibles. L’ipilimumab, un anti CTLA-4, était aussi un candidat logique et il était donc intéressant d’explorer son association au pembrolizumab dans cette indication.

L’étude de phase III KEYNOTE-598 est une étude randomisée qui porte comme l ‘étude KEYNOTE-024, sur des patients présentant un cancer bronchique non à petites cellules métastatique :

  • N’ayant pas reçu antérieurement de traitement systémique pour leur cancer,
  • Sans mutation activatrice de l’EGFR  ni translocation ALK-EML4, 
  • Ayant un PS à 0 ou 1 
  • Avec un score PDL1 d’au moins 50%. 
  • Et qui ne devaient pas avoir de métastase cérébrale non traitée, de maladie auto-immune, d’antécédent de pneumopathie non infectieuse nécessitant des corticoïdes, de radiothérapie dans les 2 semaines précédentes.

Ils étaient stratifiés selon le PS (0 vs 1), le pays (est asiatique ou non) et l’histologie (épidermoïdes vs non épidermoïde) et randomisés pour recevoir :

  • Soit du pembrolizumab à 200 mg toutes les 3 semaines associé à un placebo, pendant 2 ans.
  • Soit ce même traitement associé à de l’Ipilimumab à 1 mg/kg toutes les 6 semaines pendant deux ans (le pembrolizumab était injecté en premier). 

Il y avait 2 objectifs principaux la survie globale et la survie sans progression. Les objectifs secondaires étaient le taux de réponse et la durée de réponse.  

Résultats

De janvier 2018 à août 2019, 568 patients de 137 sites dans 24 pays ont été inclus. Les caractéristiques des patients des deux groupes étaient bien réparties.  

Avec une durée médiane de suivi de 20,6 mois les résultats sont résumés sur le tableau ci-dessous :

 

Pembrolizumab + Ipilimumab 

Pembrolizumab + Placebo

p

Efficacité

Durée médiane de survie (95%CI) (mois)

21,4 16,6-NA)

21,9 (18-NA)

 

HR de survie(95%CI)

1,08 (0,85-1,37

 

Taux de survie à un an (%)

63,6

67,9

0,74

Durée médiane de PFS  (95%CI) (mois)

8,2 (6-10,5)

8,4 (6,3-10,5)

 

HR de PFS  (95%CI)

1,06 (0,86-1,3)

0,72

Taux de réponse (%)

45,4

45,4

 

Taux de réponse complète  (%)

4,6

2,8

 

Durée médiane de réponse  (mois)

16,1

17,3

 

Toxicité

Evènements adverses  (%)

96,5

93,6

 

Evènements adverses sévères (%)

51,4

38,4

 

Evènements adverses de grade 3  (%)

62,4

50,2

 

Evènements adverses de grade 5  (%)

13,1

7,5

 

Evènements adverses rapportés au traitement de grade 5 : N (%)

7[1] (2,5)

 

Effets adverses immunologiques

44,7

32,4

 

Cette importante étude de phase III n’a donc pas démontré que, chez des patients atteints de cancers bronchiques non à petites cellules de stade IV,  l’association d’ipilimumab au pembrolizumab en première ligne chez des patients qui expriment PD-L1  à plus de 50% est plus efficace que l’immunothérapie par pembrolizumab. Elle est en revanche plus toxique ce qui ne plaide pas pour l’avenir de cette association dans cette indication

 

 

 

 

 

[1] 2 myocardites, 1 insuffisance surrénalienne, 1 ictère, 1 hypophysite, 1 pneumopathie et curieusement 1 progression de la maladie. 

Reference

Pembrolizumab Plus Ipilimumab or Placebo for Metastatic Non-Small-Cell Lung Cancer With PD-L1 Tumor Proportion Score ≥ 50%: Randomized, Double-Blind Phase III KEYNOTE-598 Study.

Boyer M, Şendur MAN, Rodríguez-Abreu D, Park K, Lee DH, Çiçin I, Yumuk PF, Orlandi FJ, Leal TA, Molinier O, Soparattanapaisam N, Langleben A, Califano R, Medgyasszay B, Hsia TC, Otterson GA, Xu L, Piperdi B, Samkari A, Reck M; KEYNOTE-598 Investigators.

J Clin Oncol 2021 Jan 29. Online ahead of print

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