Chest

La présence d’images interstitielles sur un scanner de dépistage est-elle associée à un risque accru de cancer ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
décembre 2019

Dépistage

Les syndromes interstitiels sont associés à un risque augmenté de cancer broncho-pulmonaire mais les images interstitielles asymptomatiques qu’on découvre fréquemment sur un scanner de dépistage le sont -elles ? 

Les auteurs de ce travail ont voulu répondre à cette question à partir des données du NLST. Dans cette étude, les radiologues, formés à la lecture des scanners de dépistage, signalaient en plus des images évocatrices de cancer la présence d’emphysème ou d’autres anomalies : les images décrites comme des images de fibrose ou comme des images réticulées ou réticulo-nodulaires, ou en nid d’abeilles ou comme des images cicatricielles ont été toutes regroupées sous le terme d’ images interstitielles. 

Au total, 50 206 des 53 452 sujets inclus dans l’étude NLST ont été inclus dans cette analyse : 5 053 (20,2%) des 25 041 participants du bras scanner avaient des images interstitielles. Ces personnes étaient significativement plus âgées, étaient plus fréquemment des femmes et avaient un BMI significativement inférieur. La présence d’images interstitielles était également significativement associée à davantage de tabagisme, à un taux significativement plus élevé de BPCO et d’emphysème, et à un taux plus élevé de syndromes restrictifs et obstructifs . En revanche il n’existait pas de lien significatif avec une exposition à l’amiante ou avec une autre exposition professionnelle. 

Avec un suivi médian de 6,6 ans, l’incidence cumulée de cancers broncho-pulmonaires chez les sujets qui avaient des images interstitielles était plus élevée dans le bras scanner avec : 

  • Dans le groupe des sujets qui avaient des images interstitielles, 121 (2,4%) cas de cancer broncho-pulmonaire ce qui représente 398 pour 100 000 personnes-années. 
  • Et dans le groupe des sujets qui n’avaient pas d’images interstitielles, 304 (1,5%) cas de cancer broncho-pulmonaire ce qui représente 249 pour 100 000 personnes-années. 

Après plusieurs analyses multivariées prenant en compte de multiples facteurs tels que l’âge, le sexe, le statut socio-économique, le BMI, les antécédents familiaux de cancer, le tabagisme, la présence d’une BPCO ou d’un emphysème, une exposition à l’amiante etc…, la présence d’images interstitielles restait liée au diagnostic de cancer broncho-pulmonaire.  

Aucune différence n’existait entre le stade, le siège ou l’histologie des cancers des patients ayant ou non des images interstitielles. En revanche la mortalité spécifique des malades qui avaient des images interstitielles était plus élevée. 

Enfin des analyses ont été également effectuées chez les participants du bras radiographie thoracique.  Elles ont abouti aux mêmes conclusions : les 1652 participants qui avaient des images interstitielles avec un risque de cancer plus élevé (rapport du taux d'indidence : 1,33 (95%CI : 1,07-1,65).  

Ces résultats confirment bien que la présence d’ images interstitielles augmente le risque de cancer broncho-pulmonaire : on connaissait déjà le risque accru observé chez les patients qui avaient une pneumopathie interstitielle diffuse ou chez les malades qui présentaient des cicatrices, par exemple de tuberculose. Ici c’est un risque accru chez l’ensemble des malades qui ont des images interstitielles qui est démontré. Soulignons toutefois que cette démonstration ne concerne que les fumeurs ou anciens fumeurs de plus de 30 PA inclus dans cette étude. 

Peut-on déduire de ces résultats qu’on pourrait, après un scanner initial, ne proposer le dépistage qu’aux seuls personnes qui présenteraient des images interstitielles ? Nous ne le pensons pas car, si 2,4% des fumeurs ou anciens fumeurs qui ont des images interstitielles auront un cancer, il y a tout de même 1,5% de ces mêmes fumeurs qui n’ont pas d’ images interstitielles et qui auront ultérieurement un cancer broncho-pulmonaire. De plus, le but du dépistage est de diminuer la mortalité spécifique, - or celle des malades qui avaient des images interstitielles était plus élevée - , et la mortalité générale, - or il est possible voire probable que, au moins pour ceux qui ont des images diffuses, la mortalité générale soit plus élevée. On pourrait peut-être en revanche dans l’avenir affiner les modèles de risque qui existent en prenant en compte la présence d’images interstitielles en même temps que les autres facteurs déjà connus.

 

Reference

Interstitial Lung Abnormalities and Lung Cancer Risk in the National Lung Screening Trial.

Whittaker Brown SA, Padilla M, Mhango G, Powell C, Salvatore M, Henschke C, Yankelevitz D, Sigel K, de-Torres JP, Wisnivesky J.

Chest 2019; 156 : 1195-1203

39 lectures

Coup de ♥ du mois

Risque de cancer du poumon chez les mineurs exposés à de faible taux de radon

novembre 2015

Si les données concernant les expositions à de fortes concentrations de radon sont bien connues,...

Lire la suite
Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer