Lancet oncology

L’évolution des patients atteints de cancer du poumon non éligibles au dépistage selon les critères de l’ USPSTF est-elle différente de celle des patients qui y sont éligibles ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
août 2019

Dépistage

En 2013, l’US Preventive Services Task Force (USPSTF) qui établit aux USA la plupart des recommandations en santé publique, a recommandé que les adultes de 55 à 80 ans, qui ont fumé au moins 30 PA, et qui, s’ils sont anciens fumeurs, ont cessé de fumer depuis moins de 15 ans, aient un scanner faiblement dosé annuel, selon les modalités du NLST (cliquer ici). Plus récemment Medicare a décidé de suivre ces recommandations et de rembourser ce dépistage pour les sujets de 55 à 77 ans qui ont les critères du NLST. Mais les auteurs de ce travail se demandent si ces critères n’écartent pas un trop grand nombre de sujet à haut risque en prenant comme principal argument que plusieurs études de cohorte américaines, notamment une cohorte de la SEER, ont monté que seulement un tiers des patients chez lesquels le diagnostic de cancer broncho-pulmonaire a été porté ont les critères du NLST. Ceux qui ne sont pas éligibles, ne le sont pas notamment parce qu’ils ont cessé leur tabagisme entre 15 et 30 ans auparavant ou parce qu’ils ont de 50 à 54 ans. 

Pour réfléchir à ce problème, les auteurs se sont demandé si l’évolution des patients atteints de cancer broncho-pulmonaire et non éligibles au dépistage selon les critères de l’USPSTF est différente de celle des patients qui sont éligibles selon ces mêmes critères.  A partir de 7798 patients consultant à la Mayo Clinic (Hospital cohort) et de 941 patients provenant d’une cohorte prospective régionale incluant les données médicales des patients résidant dans le Comté d'Olmsted, un Comté du Minnesota (Community Cohort), une cohorte a été constituée comprenant  des patients atteints de cancer broncho-pulmonaire, âgés de 50 à 80 ans, ayant fumé au moins 30 PA, fumeurs ou anciens fumeurs et dans ce cas ayant cessé de fumer dans les 30 dernières années. 

La durée médiane de survie de cette population était de 16,9 mois et le taux de survie à 5 ans était de :

  • 23% chez les patients qui avaient les critères de l’USPSTF, 
  • 22% chez les malades de 50 à 54 ans,
  • Et 27% chez les patients qui avaient interrompu leur tabagisme depuis plus de 15 ans. 

Y compris après des analyses multivariées et après l’appariement de patients le risque de décès était le même chez les sujets plus jeunes, chez ceux qui avaient arrêtés leur tabagisme depuis plus de 15 ans et chez les patients qui avaient les critères de l’USPSTF. 

La conclusion de cette étude est que les patients qui ont cessé leur tabagisme depuis plus de 15 ans ou ceux qui ont moins de 55 ans ont une survie identique à celle de patients qui auraient eu un cancer broncho-pulmonaire éligible au dépistage selon les critères de l’USPSTF. C’est le message de cet article qui ne signifie pas forcément que ces critères doivent être modifiés tant que la démonstration que le dépistage diminue la mortalité spécifique ne sera pas apportée dans cette population comme elle l’a été dans l’étude NLST. Rappelons que les bénéfices et les inconvénients du dépistage sont liés (cliquer ici) : de ce fait,  montrer qu’une maladie a la même gravité par exemple entre 55 et 75 ans et entre 50 et 55 ans ne veut pas dire que le nombre de scanners nécessaires pour dépister des cancers de stade précoce ou pour éviter un décès par cancer du poumon serait le même. Et si ces nombres sont différents, les inconvénients tels que par exemple le coût ou l’irradiation seront aussi différents puisqu’ils dépendent de ces nombres. De même, il n’est pas certain que les conséquences de ces inconvénients soient les mêmes.  Par exemple, même si  le risque de cancer radio-induit est le même, on imagine facilement que ces cancers radio-induits qui surviennent très longtemps après l’irradiation n’auraient pas les mêmes conséquences selon que le dépistage est commencé à 50 ou à 70 ans … Dans ce domaine, la poursuite d’une recherche clique très active, dans des populations différentes de celle où le bénéfice du dépistage est démontré, est donc essentielle. 

 

 

Reference

5-year overall survival in patients with lung cancer eligible or ineligible for screening according to US Preventive Services Task Force criteria: a prospective, observationalcohort study.

Luo YH, Luo L, Wampfler JA, Wang Y, Liu D, Chen YM, Adjei AA, Midthun DE, Yang P.

Lancet Oncol2019; 20 : 1098-1108

46 lectures

Coup de ♥ du mois

Risque de cancer du poumon chez les mineurs exposés à de faible taux de radon

novembre 2015

Si les données concernant les expositions à de fortes concentrations de radon sont bien connues,...

Lire la suite
Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer