Journal of Thoracic Oncology

Pneumopathies sous immunothérapie : une série prospective

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
août 2020

Immunothérapie, Effets secondaires des médicaments

Les pneumopathies interstitielles induites par l'immunothérapie représentent une importante complication de l’immunothérapie et semblent plus fréquentes lorsque l’immunothérapie est prescrite pour un cancer broncho-pulmonaire que quand elle l’est pour un mélanome. Beaucoup d’études rétrospectives à propos de ces pneumopathies ont été publiées et nous un avons commenté plusieurs sur ce site (cliquer ici)  (et ici) (et ici). L’originalité de l’étude dont les résultats sont publiés ici est qu’elle est prospective.

C’est une étude prospective multicentrique japonaise dans laquelle ont été recueillies pendant deux ans les données de 142 patients atteints de cancer bronchique non à petites cellules de stade IIIB ou IV le plus souvent déjà traités par chimiothérapie. Ils devaient recevoir soit 3 mg/kg de nivolumab toutes les 2 semaine, soit 200 mg de pembrolizumab toutes les 3 semaines. Des EFR et un prélèvement sanguin étaient réalisés avant tout traitement. Le diagnostic de pneumopathie interstitielle induite par l'immunothérapie était retenu si existaient 1)  des signes et symptômes cliniques évocateurs 2)  des signes scanographiques évocateurs d’apparition récente permettant de classer cette pneumopathie, 3) des examens biologiques évocateurs (LBA par exemple) et 4) des arguments permettant d’exclure d’autres causes à cette pneumopathie.

Parmi ces 142 patients, 138 étaient éligibles. Leur âge médian était de 69 ans et plus de 80 % était de sexe masculin. Près des trois quarts avaient un cancer de stade IV  et 60 % un adénocarcinome. Dix patients avaient une mutation de l’EGFR.  

Au total 20 de ces 138 patients (14,5%) ont développé une pneumopathie interstitielle après un délai médian de 51,5 jours.  La gravité de ces pneumopathies était variable : grade 1 chez 6 patients, grade 2 également chez 6 patients, grade 3 chez 5 patients et grade 5 chez 3 patients. Aucune pneumopathie de grade IV n’a été observée.  

L’arrêt du traitement et la mise en œuvre d’une corticothérapie ont été effectués chez 13 patients ce qui n’a pas pu empêcher le décès de 3 patients et l’absence de régression chez 1 patient.  

Les résultats des exploration fonctionnelles respiratoires étaient prédictifs de la survenue d’une pneumopathie interstitielle induite par l'immunothérapie :

  • Les malades qui avaient une CVF basse ont eu dans 23,6% des cas une pneumopathie interstitielle, alors que c’était le cas de seulement 4,5% de ceux qui avaient une CVF élevée. Cette différence était significative (p=0,0067). 
  • De même, les malades qui avaient un VEMS bas ont eu dans 19,7% des cas une pneumopathie interstitielle, alors que c’était le cas de seulement 8,1% de ceux qui avaient un VEMS  élevé. Cette différence était aussi significative (p=0,0025). 
  • En analyse multivariée seule la CVF était significativement prédictive de la survenue de pneumopathie interstitielle induite par l'immunothérapie.

Enfin, il n’est pas intéressant de constater que la survie médiane et les taux de survie à 1 et 2 ans des patients qui ont eu une pneumopathie interstitielle (16,2 mois, 55 et 31,3%) étaient très proches de ceux des patients qui n’en ont pas eu (14 mois, 58,8 et 33,1%).    

Quatre notions sont à retenir de cette intéressante étude prospective : 1) la fréquence des pneumopathies interstitielles induites par l'immunothérapie est nettement plus élevée que dans les études cliniques, 2)  la plupart de ces pneumopathies surviennent précocement, 3) ces pneumopathies sont potentiellement graves (2% de l’ensemble des malades en sont morts)  et 4) une diminution de la CVF est prédictive  de la survenue de pneumopathies interstitielles induites par l'immunothérapie.

Reference

Assessment of Immune-Related Interstitial Lung Disease in Patients With NSCLC Treated with Immune Checkpoint Inhibitors: A Multicenter Prospective Study.

Suzuki Y, Karayama M, Uto T, Fujii M, Matsui T, Asada K, Kusagaya H, Kato M, Matsuda H, Matsuura S, Toyoshima M, Mori K, Ito Y, Koyauchi T, Yasui H, Hozumi H, Furuhashi K, Enomoto N, Fujisawa T, Nakamura Y, Inui N, Suda T.

J Thorac Oncol 2020; 15 : 1317-1327

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