Thorax

Quel est le taux de cancers de stade I prouvés qui sont « non agressifs » ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
mai 2018

Dépistage

Tous ceux qui s’intéressent au dépistage ont entendu parler des 3 biais qui sont régulièrement mis en avant, le biais d’avance au diagnostic, le biais de lenteur d’évolution et le biais de surdiagnostic. Ce dernier est le plus connu ; il désigne un dépistage inutile puisque les cancers faisant l’objet d’un surdiagnostic n’évoluent pas et ne causent pas la mort du sujet dépisté puisqu’ils restent méconnus.  Ce biais est régulièrement mis en avant pour le dépistage des cancers de la prostate et également pour  le dépistage du cancer du sein pour lequel le surdiagnostic serait moins fréquent que dans le dépistage du cancer de la prostate mais ne serait pas négligeable. 

Le travail publié ici ne porte pas à proprement parler sur les cancers du poumon dépistés mais, ce qui revient pratiquement au même, sur les cancers broncho-pulmonaires découverts par hasard lors d’une imagerie effectuée pour une autre raison que la recherche d’un cancer broncho-pulmonaire. 

Pour tenter de définir quelle est la réelle fréquence des cancers du poumon « non agressifs », les auteurs ont interrogé la base de données américaine  SEER  dans le but de définir la survie spécifique des patients d’au moins 65 ans présentant un cancer de stade I histologiquement confirmé et non traité entre 1992 et 2010. Pour minimiser le risque de méconnaitre une extension ganglionnaire seuls les patients qui ont eu au moins un scanner, un TEP-FDG ou une médiastinoscopie dans les 30 jours qui précédent ou dans les 90 jours qui suivent le diagnostic, ont été inclus. 

Sur 2725 malades, 528 ne répondaient pas à cette condition de sorte que ce travail a porté sur 2197 patients dont 1/3 avaient de 65 à 74 ans et la moitié de 75 à 84 ans et le reste un âge ≥ 85 ans. Il y avait 41% d’adénocarcinomes, 40% d’épidermoïdes, 6% de cancers à grandes cellules et 13% d’autres cancers. 

Avec un suivi très prolongé et en vérifiant que les décès n’étaient pas liés à une autre cause, la probabilité d’être vivant ou décédés d’une autre cause approchait 0% à 100 mois et le taux estimé de cancers « non agressifs » était de 2,4% (95%CI : 1-3,8%) et ce taux ne différait pas significativement entre les tumeurs de plus ou moins 15mm. 

Cette étude confirme que ces malades, chez lesquels un cancer de petite taille a été découvert par hasard, doivent être traités comme les autres quelle que soit la taille de leur tumeur, à partir du moment où le diagnostic de cancer est vérifié. De plus, cette étude apporte des arguments pour penser que le surdiagnostic de cancers du poumon est rare. Certaines études, comme l’étude NLST, l’ont estimé à beaucoup plus du fait d’un excès de cancers dans le bras dépisté, il est probable que cet excès soit plutôt lié à un biais de lenteur d’évolution, ce qui est tout de même très différent. 

 

Reference

Assessing the extent of non-aggressive cancer in clinically detected stage I non-smallcell lung cancer.

Kale MS, Sigel K, Mhango G, Wisnivesky JP.

Thorax2018; 73 : 459-463

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Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer