Annals of Oncology

Résultats à 10 ans de l’étude randomisée italienne de dépistage MILD

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
avril 2019

Dépistage

En 2012, les résultats à 5 ans de l’un des 3 essais de dépistage italiens, l’essai MILD étaient publiés.  Cet essai institutionnel, financé par le Ministère de la Santé et d’autres organismes publics italiens, portait sur un peu plus de 4000 participants de 49 à 75 ans,  fumeurs ou anciens fumeurs (arrêt depuis moins de 10 ans) à au moins 20 PA. Il  comparait à un bras observationnel deux bras expérimentaux : un bras avec des scanners annuels et un bras avec des scanners bisannuels. A 5 ans aucun signe en faveur d’un effet du scanner sur la mortalité spécifique ou générale n’avait été décelé (cliquer ici)

Ce sont maintenant les résultats à 10 ans de cette étude qui sont présentés ici. 

 

Rappelons que cette étude initiée en 2005 était au départ conçue comme un projet national devant recruter 10 000 participants chez lesquels la  réalisation de scanners annuels devait être comparée à celle de  scanners bisannuels et à un bras contrôle. . 

Or au début le comité d’éthique n’accepta que la comparaison entre scanners annuels et scanners bisannuels et cette étude n’a été finalement réalisée que dans un seul centre. Ceci explique les différences entre les 3 groupes :

  • Au départ 653 patients ont été randomisés entre annuel (n=326) et bisannuel (n=327). 
  • Puis les 3446 participants suivants ont été randomisés entre scanner (n=1723, 864 annuel et 859 bisannuel) et contrôle (n = 1723). 

Ainsi finalement 4099 participants ont été randomisés entre dépistage annuel ou bisannuel  (n=2376) et contrôle (n=1723) . 

L'objectif principal était la mortalité spécifique à 10 ans. Les objectifs secondaires mentionnés ici étaient la mortalité générale et le nombre de cancers du poumon. 

Ces objectifs secondaires sont différents de ceux listés dans Clinical trials.gov (arrêt du tabac, DNA circulant et microRNA) (cliquer ici). De même sur ce site il était prévu pour le bras contrôle la réalisation de tests fonctionnels et d’une prévention primaire. 

Les analyses de mortalité effectuées étaient basées sur 4099 participants  pour détecter une  réduction de mortalité de toute cause de 10% avec une puissance de 25% et une réduction de 30 % de la mortalité spécifique avec une puissance de 45%. 

Résultats.

Les caractéristiques des patients des deux groupes n’étaient pas bien réparties :

  • Il y avait significativement davantage de sujets jeunes et de femmes dans le bras contrôle,
  • Il y avait significativement davantage d’anciens fumeurs dans les bras expérimentaux (31% vs 10%, p<0,0001) et le tabagisme cumulé était significativement inférieur dans ces bras (22 vs 28% à <30 PA).

Les différences de mortalité globale n’étaient pas significatives : 594/100 000 personnes par an dans les bras expérimentaux  vs 654/100 000 dans le bras contrôle (p=0,45). 

Il y avait dans les bras expérimentaux plus de cancers broncho-pulmonaires (431 vs 373/100 000 personnes par an), plus de cancers de stades I (50 vs 21,7%) et plus de cancers réséqués (65 vs 26%). La mortalité spécifique était de 173/100 000 personnes par an dans les bras  expérimentaux et de  247/100 000 dans le bras contrôle. Cette différence n’était pas significative.

L’analyse de mortalité à 10 ans est en revanche différente :

  • En ce qui concerne la mortalité globale, le risque cumulé à 10 ans était de 5,8% dans les bras expérimentaux et de 6,5% dans le bras contrôle, ce qui représente une réduction du risque de décès de 20% (HR 0,80, 95%CI 0,62-1,03; p=0,07).
  • En ce qui concerne la mortalité spécifique par cancer broncho-pulmonaire le risque cumulé à 10 ans était de 1,7% dans les bras expérimentaux et de 2,5% dans le bras contrôle, ce qui représente une réduction du risque de décès significative de 39% (HR 0,61 95%CI 0,39-10,95; p=0,02).

Une analyse en landmark au delà de 5 ans a confirmé cette réduction significative du risque de décès dans le bras expérimental.  

Cet essai prospectif et monocentrique italien est loin d’avoir les effectifs (et donc la puissance) et la méthodologie indiscutable de l’étude NLST et de l’étude NELSON qui toutes deux sont positives. Néanmoins ces résultats vont dans le même sens comme déjà une autre étude italienne, l’étude ITALUNG dont nous avions commenté les résultats en juillet 2017 (cliquer ici). La troisième étude italienne, l’étude DANTE, était au contraire négative mais la publication des résultats n’a été faite qu’avec 7 ans de recul alors que MILD et ITALUNG ont un recul de 10 ans (cliquer ici)

Il devient de plus en plus difficile en France de soutenir que l’intérêt du dépistage par scanner faiblement dosé n’est pas démontré. 

 

 

 

Reference

Prolonged Lung Cancer Screening Reduced 10-year Mortality in the MILD Trial.

Pastorino U, Silva M, Sestini S, Sabia F, Boeri M, Cantarutti A, Sverzellati N, Sozzi G, Corrao G, Marchianò A.

Ann Oncol2019 Apr 1. Epub ahead of print

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Revue : British Journal of Cancer