New England Journal of Medicine

Un modèle pour le diagnostic de nodule applicable au dépistage ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
septembre 2013

Imagerie : Radiologie, Dépistage, Diagnostic précoce

Si la sensibilité du scanner thoracique pour le dépistage est très élevée, sa valeur prédictive positive (probabilité que le dg soit vrai si le signe est présent : VPP = VP/(VP+FP) est beaucoup plus basse. Elle est par exemple de  de 2,4 à 5,2% % pour le scanner dans l’étude NLST (/prev-em-onco/3409) compte tenu du nombre élevé de faux positifs. Ceci explique que plusieurs études aient cherché à diminuer le nombre de faux positifs.

C’est le cas de l’étude que publie cette semaine le N Engl J Med.

Deux cohortes ont servi à la construction du modèle qui est présenté ici :

-       une cohorte pour le développement qui inclue 2537 participants enrôlés dans une étude multicentrique, la Pan-Canadian Early Detection of Lung Cancer Study : il s’agit de fumeurs ou d’anciens fumeurs, âgés de 50 à 75 ans sans antécédents de cancer broncho-pulmonaire. Ils doivent avoir un risque de cancer broncho-pulmonaire de 2%. Ce risque est calculé à partir de l’essai PLCO (/prev-em-onco/3326). A noter que pour faire partie de cette cohorte il n’y a pas de valeur seuil de nombre de paquets années ni d’années de cessation du tabagisme pour les anciens fumeurs.

-       Une cohorte de validation correspondant aux participants enrôlés dans plusieurs études de chémoprévention sponsorisés par le NCI et conduits par la British Columbia Cancer Agence (BCCA). Les participants devaient être fumeurs ou anciens fumeurs, âgés de 50 à 74 ans sans antécédents de cancer broncho-pulmonaire. Ils devaient avoir fumé au moins 30 PA.

Les scanners dont la technique est bien précisée pour les deux cohortes sont considérés comme anormaux à partir du moment où ils objectivent au moins un nodule de 1mm de diamètre.

Un nodule est considéré comme bénin s’il est totalement calcifié ou s’il présente des calcifications en popcorn ou si la taille d’un nodule solide est inchangée à 2 ans.

Dans la première cohorte, 1871 personnes, c’est à dire 73,7% avaient 7008 nodules. Cent deux étaient malins.

Dans la deuxième cohorte, 1090 personnes avaient 5021 nodules et 42 étaient malins. Ainsi les taux de cancers parmi ces personnes étaient très élevés  puisque de 5,5 et 3,7% respectivement.

Comme le caractère spiculé ou non n’était pas noté dans la deuxième cohorte, des modèles prenant ou ne prenant pas en compte cette donnée ont été réalisés.

Dans le modèle qui prenait en compte la spiculation, mais pas tous les autres facteurs, le diagnostic de cancer était associé avec le sexe féminin, la taille, le siège dans un lobe supérieur, et la spiculation. Dans un modèle prenant en compte davantage de facteurs étaient également prédictifs de malignité : les antécédents familiaux de cancer broncho-pulmonaire,  l’emphysème, un petit nombre de nodules,  et  une composante  partiellement solide (par comparaison avec une composante totalement solide).

Lorsqu’on applique l’un de ces modèles (prenant en compte la spiculation) à un programme de dépistage avec au moins 5% de risque de cancer, la sensibilité serait de 71,4 %, la spécificité de 95,5 %, la valeur prédictive positive (VPP) de 18,5 % et la valeur prédictive négative (VPN) de 99,6 %. Seulement 5,5 % des nodules ont été ainsi finalement classés positifs.

Cette étude qui porte sur un très grand nombre de nodules permet de vérifier puis de modéliser un certain nombre de données qui étaient assez connues : on savait bien que la taille des nodules était un facteur hautement prédictif de cancer dès la première publication de Claudia Henschke. De même la prédominance des cancers aux lobes supérieurs a déjà été signalée. La modélisation proposée ici est intéressante en ce sens que le risque peut-être calculé  dès le premier scanner, sans que, comme dans la NELSON study par exemple, il soit besoin de refaire un scanner.

Un certain nombre de points peuvent cependant être discutés :

-       Pourquoi avoir pris comme critère de positivité tous les nodules quelle qu’en soit la taille ? La plupart  des études de dépistage ne considérent comme positifs que les nodules de taille supérieure à 4 ou 5mm. Le fait d’avoir introduit des nodules de plus petite taille en grand nombre (la médiane est de 4,3 et 3,7mm) dans les deux cohortes ne contribue-t-il pas à amplifier l’effet de la taille puisque la quasi totalité des très petits nodules sont non cancéreux ?  

-       On est un peu étonné du faible nombre de nodules en verre dépoli positifs. Quels étaient les critères de négativité pour ces nodules ? Ont-ils été surveillés assez longtemps ?

-       Ces modèles sont-ils réellement applicables aux études de dépistages ? Faire l ‘économie de scanners itératifs est le but qui est légitimement poursuivi. Et si la VPN de ces modèles est proche de 100%,  comme l’annoncent les auteurs, la réponse est certainement positive puisqu’on pourrait affirmer, sans chance de se tromper, qu’un nodule ne serait pas cancéreux. Néanmoins le nombre élevé de très petits nodules dans cette étude ne contribue-t-il pas, en réduisant le nombre de faux négatifs (pratiquement tous les nodules de 1 à 3 mm sont des vrais négatifs), à élever artificiellement la VPN ?

-       Enfin on peut regretter que le l’intensité et la durée du tabagisme ne soit pas prise en compte. 

Reference

Probability of cancer in pulmonary nodules detected on first screening CT.

McWilliams A, Tammemagi MC, Mayo JR, Roberts H, Liu G, Soghrati K, Yasufuku K, Martel S, Laberge F, Gingras M, Atkar-Khattra S, Berg CD, Evans K, Finley R, Yee J, English J, Nasute P, Goffin J, Puksa S, Stewart L, Tsai S, Johnston MR, Manos D, Nicholas G, Goss GD, Seely JM, Amjadi K, Tremblay A, Burrowes P, MacEachern P, Bhatia R, Tsao MS, Lam S.

N Engl J Med 2013; 369 : 910-9.

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Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer