Clinical Lung Cancer

Tecemotide et bevacizumab après radiochimiothérapie pour CBNPC de stade III : une étude de phase II.

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
novembre 2020

Immunothérapie, Thérapeutique ciblée, Radiothérapie / Radiofréquence, Traitement des stades III

Le traitement des stades III de CBNPC a récemment évolué après des années d’essai négatifs dans cette indication. Les études évaluant des chimiothérapies d’induction ou de consolidation, des études d’escalades de doses de radiothérapie…etc….n’ont jamais réussi à démontrer un bénéfice en survie. Le standard a changé suite aux résultats de l’essai PACIFIC qui a montré l’intérêt du durvalumab en consolidation, pour les patients n’ayant pas progressé à l’issue du traitement par radio-chimiothérapie, et exprimant PDL1 à au moins 1% (cliquer ici) (et ici)  (et ici) . La médiane de survie a été présentée au dernier congrès virtuel de l’ESMO et s’affichait, pour le bras durvalumab, à 47.5 mois.

L’essai rapporté ici évalue le tecemotide (vaccin anti MUC1, également connu sous l’appellation L-BLP25) associé au bevacizumab après radio-chimiothérapie pour des cancers non à petites cellules non épidermoïdes de stades III non resequables. 

Il s’agit d’une étude de phase II simple bras, en deux phases. Dans la première, les patients recevaient une chimiothérapie (par carboplatine AUC2 et paclitaxel 45 mg/m2 hebdomadaire) pendant 6 semaines associée à une radiothérapie de 66 Gy (33 séances de 2 Gy sur 6.5 semaines) sur la tumeur et les aires ganglionnaires envahies. La radiothérapie débutait dans les 72 heures suivant l’instauration de la chimiothérapie. Dans les 4 semaines suivant la fin de l’association RT/CT, les patients n’ayant pas progressé et n’ayant pas de toxicité rédhibitoire, recevaient 2 cycles de chimiothérapie de consolidation par paclitaxel 225 mg/m2 et carboplatine AUC 6 toutes les 3 semaines. La deuxième phase de l’essai, pour les patients n’ayant toujours pas progressé et n’ayant pas de critères d’exclusion, comportait une maintenance par une dose unique de Cyclophosphamide 300 mg/m2 3 jours avant le 1er cycle puis une association de bevacizumab (15 mg/kg) et le tecemotide S/C (806 mg hebdomadaires pendant les 2 premiers cycles puis 1 fois au J1 tous les deux cycles) jusqu’à progression ou toxicité.

Au total, 68 patients (sur 70 planifiés) ont été traités dans la première phase de l’essai, et 39 ont complété le traitement comme prévu (57%). Les causes d’arrêt à ce stade étaient la progression (16%) suivie des toxicités (15%). Trente-trois patients seulement ont alors été traités dans le cadre de la deuxième phase avec un nombre médian de cycles de 11. Les causes d’arrêt étaient les toxicités (41%) et la progression (34%).

Les toxicités de grade 3 dans la 1ere partie ont concerné 27 patients et étaient hématologiques dans la plupart des cas. Dans la phase 2, on note 11 patients ayant une toxicité de grade 4 ou plus, dont un décès toxique (sans précision) 1 sepsis de grade 4 et des problèmes d’HTA.

En termes d’efficacité, on note à l’issue de la première phase, 2 réponses complètes, 34 réponses partielles et 19 stabilités. Dans la 2eme partie, 23 patients sur 32 évaluables ont finalement progressé. La médiane de PFS chez ces 32 patients était de 14.9 mois (95% CI 11.0-20.9 mois). Le taux de PFS à 2 ans était de 29% (95%CI 14%-46%). Après un suivi médian de près de 57 mois, la médiane d’OS était de 42.7 mois (95% CI 21.7-63.3 mois) avec un taux de survie à 2 ans de 69% (95%CI 50%-82%). 

Cet essai coopérateur a atteint son objectif. Néanmoins, même si la comparaison indirecte entre essais reste discutable, il ne semble pas que ce schéma thérapeutique, compliqué et toute de même un peu toxique, apporte un réel bénéfice par rapport au durvalumab administré en monothérapie tous les 15 jours pendant un an (PACIFIC) alors même que dans la présente étude le traitement de maintenance est réservé à des patients hautement sélectionnés. Cibler MUC1 en oncologie thoracique semblait une idée séduisante. Cette protéine ubiquitaire est particulièrement exprimée dans de nombreux cancers bronchiques et sa glycosylation de mauvaise qualité, laisse apparaitre son épitope central qui peut servir de cible dans le cadre d’une vaccination. Néanmoins, en pratique clinique, la plupart des essais réalisés jusqu’alors se sont révélés très décevants. Seul le tecemotide effectivement dans l’essai START, laissait penser qu’il avait un potentiel intérêt chez les patients de stade III ayant préalablement reçu une RT/CT concomitante. Le bénéfice n’apparaissait pas en cas de RT/CT séquentielle. Il est curieux que les auteurs aient proposé dans leur design actuel d’administrer 2 cycles de CT à doses pleines après la fin de l’association RT/CT. Le bénéfice de l’association entre immunothérapie (vaccin ou inhibiteur de point de contrôle) et RT/CT semble maximal lorsque les traitements s’enchainent sans délai. Dans l’essai présent, l’ajout du bevacizumab devait permettre d’optimiser la réponse immunitaire, et l’injection préalable de cyclophosphamide devait contrôler l’immunodépression éventuelle consécutive à l’association RT/CT. 

Ce schéma complexe en l’état ne semble pas près de devenir un standard. Néanmoins, l’association éventuelle avec un inhibiteur de point de contrôle pourrait peut-être intéressante.

Reference

Phase II Study of Immunotherapy With Tecemotide and Bevacizumab After Chemoradiation in Patients With Unresectable Stage III Non-Squamous Non-Small-Cell Lung Cancer (NS-NSCLC): A Trial of the ECOG-ACRIN Cancer Research Group (E6508).

Patel JD, Lee JW, Carbone DP, Wagner H, Shanker A, de Aquino MTP, Horn L, Johnson ML, Gerber DE, Liu JJ, Das MS, Al-Nsour MA, Dakhil CSR, Ramalingam S, Schiller JH.

Clin Lung Cancer 2020; 21 : 520-526

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