Lancet oncology

Un nouveau traitement actif chez les patients présentant une translocation ALK-EML4

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
juin 2013

ROOT

La poursuite d’une recherche clinique très active en terme de médicaments inhibiteurs de ALK est motivée par le désir d’anticiper les résistances qui apparaissent immanquablement et d’améliorer  la pénétration cérébrale de ces produits, problème déjà évoqué sur ce site (/depister-les-cancers-broncho-pulmonaires-chez-les-fumeurs-infectes-par-le-vih, /mono-ou-bitherapie-des-cbnpc-des-patients-metastatiques-de-ps-2-une-meta-analyse, /profil-moleculaire-des-cancers-adenosquameux).

Le CH5424802 (RO5424802) est un nouvel inhibiteur sélectif de ALK développé par les laboratoires CHUGAI qui a une importante activité in vitro et qui agirait sur des lignées réfractaires au crizotinib.

L’étude rapportée ici est une étude de phase I-II industrielle qui a été menée sur 2 ans chez des patients présentant un cancer bronchique non à petites cellules de stade IV présentant un réarrangement ALK-EML4. 

Sur 436 patients screenés pour ALK, 135 étaient ALK positifs (FISH ou RT-PCR-PCR). Parmi ceux-ci, 70 ont été traités soit en phase I (n=24), soit en phase II (n=46). Les autres patients étaient inéligibles pour l’étude.

Les résultats de tolérance et d’efficacité de la phase I ont permis, en l’absence de toxicité limitante, de retenir la dose explorée maxima de 300 mg deux fois par jour pour l’étude de phase II.

Sur les 46 patients explorés en phase 2, 2 réponses complètes, 41 réponses partielles, 1 stabilité ont été affirmées par un comité indépendant. Pour les 2 derniers patients la réponse n’a pu être précisée du fait d’un retrait anticipé, de sorte qu’aucune progression n’a été enregistrée.

Cette étude est toujours en cours et 40 des 46 patients (87%) sont encore sous traitement. Quinze des 46 patients (33%) avaient des métastases cérébrales. Douze avaient reçu une radiothérapie cérébrale et 3 étaient cliniquement stables et asymptomatiques sans traitement.  Aucune progression cérébrale sous traitement  n’a été notée chez les patients qui avaient reçu une radiothérapie cérébrale et 2 des 3 qui n’en avaient pas reçu sont restés stables plus de 300 jours.

Tous les patients ont eu des effets secondaires. Si aucun effet de grade 4 et aucun décès n’ont été rapportés, 17 (37%) des patients ont eu des toxicité de grade 3, 5 un SAE et 4 ont du interrompre leur traitement pour toxicité (œdème cérébral, hémorragie tumorale, pneumopathie interstitielle et cholangite sclérosante). Aucune réduction de dose n’a du être réalisée.

Parmi les autres effets observés, les modifications du goût ont été les plus fréquentes. Le profil de toxicité est par ailleurs différent de celui du crizotinib sans troubles visuel. 

Ces résultats très intéressants amènent à 3 commentaires :

  1. Les taux de réponse qui sont rapportés ici sont très élevés et sont encore plus élevés que ceux rapportés avec le crizotinib (/la-longueur-des-telomeres-des-cellules-sanguines-peripheriques-des-cbnpc-operes-est). Ceci peut témoigner d'une action sur des clônes cellulaires résistants au crizotinib. Néanmoins, la comparaison d’études de phase 2 est toujours hasardeuse. En effet, il ne s’agit peut être pas exactement des mêmes malades : par exemple,  dans cette étude, tous les patients avaient un PS à 0 ou 1 alors que dans l’étude menée avec le crizotinib citée ci-dessus, 12% des patients avaient un PS ≥2. Surtout cette étude est exclusivement japonaise, alors que l'étude menée avec le crizotinib était internationale. Si les résultats de cette étude se confirment, la comparaison en phase 3 avec le crizotinib sera nécessaire.
  2. Les auteurs de cette étude suggèrent  un « effet favorable »  sur les métastases cérébrales. Ceci est également discutable dans la mesure où les métastases cérébrales nécessitant un traitement représentaient une cause d’inéligibilité, de sorte que 12 des 15 malades inclus avaient reçu une radiothérapie cérébrale. Il est possible que celle-ci ait modifié la pénétration cérébrale de ce traitement comme cela avait été suggéré dans d’autres articles (/mono-ou-bitherapie-des-cbnpc-des-patients-metastatiques-de-ps-2-une-meta-analyse).  Quant aux trois autres patients, dont les métastases étaient spontanément stables et non symptomatiques, deux le sont restées pendant plus de 300 jours ce qui n’est pas forcément inhabituel. Pour démontrer une activité cérébrale, la mise en évidence de réponses cérébrales objectives aurait été plus convaincante que ces stabilités.
  3. Enfin ces résultats sont très préliminaires : la médiane de traitement est à 7.1 mois (1–11) et celle de suivi à 7.6 mois (3.4–11.3). Il sera très intéressant de suivre les résultats qui seront donnés avec plus de recul. 

Reference

CH5424802 (RO5424802) for patients with ALK-rearranged advanced non-small-cell lung cancer (AF-001JP study): a single-arm, open-label, phase 1-2 study.

Seto T, Kiura K, Nishio M, Nakagawa K, Maemondo M, Inoue A, Hida T, Yamamoto N, Yoshioka H, Harada M, Ohe Y, Nogami N, Takeuchi K, Shimada T, Tanaka T, Tamura T.

Lancet Oncol 2013; 14 : 590-8.

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Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer