Journal of Thoracic Oncology

BEVERLY : une étude de phase III randomisée comparant Bevacizumab et Erlotinib au seul Erlotinib chez les patients atteints de CBNPC mutés EGFR

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
septembre 2022

Thérapeutique ciblée, EGFR

Des données précliniques ayant suggéré que la voie VEGF pouvait jouer un rôle dans les mécanismes de résistance aux anti EGFR, plusieurs études de phase II, explorant l’association des anti EGFR aux anti VEGF, ont été conduites d’abord au Japon montrant dès 2014 un bénéfice significatif de survie sans progression de l’association bevacizumab et erlotinib en première ligne (cliquer ici) puis aux USA (cliquer ici) et en Europe (cliquer ici). Ensuite, en avril 2019 nous commentions les résultats de l’analyse intermédiaire d’une étude de phase III japonaise comparant à nouveau erlotinib et bevacizumab à erlotinib : cette étude était positive sur son objectif principal, puisque chez 228 patients La survie sans progression médiane était de 16,9 mois dans le bras expérimental et de 13,3 mois dans le bras contrôle (HR = 0,605, 95% CI : 0,417–0,877; p=0,016) (cliquer ici).  

Dans ce contexte historique a été commencé en 2016 l’étude de phase III multicentrique académique italienne BEVERLY dans laquelle les patients atteints d’un cancer bronchique non à petites cellules non épidermoïde avec mutation activatrice de l'EGFR étaient randomisés pour recevoir soit de l’erlotinib à 150 mg/j soit de l’erlotinib aux mêmes doses et du bevacizumab à 15 mg/kg toutes les 3 semaines. Deux objectifs principaux étaient définis : la survie sans progression des investigateurs et la survie sans progression obtenue par une relecture centralisée. Les objectifs secondaires étaient la survie globale, la réponse et la toxicité.   Il fallait randomiser 200 patients et observer 126 progressions ou décès pour déceler un HR de survie sans progression à 0,60. En octobre 2017, du fait d’une lenteur d’inclusion, le nombre de patients a été ramené à 160 sans changer l’objectif.  

Résultats 

De 2016 à 2019, 160 patients ont été randomisés, 80 dans chacun des deux bras. Les caractéristiques des patients des deux groupes étaient bien réparties à l’exception du taux de fumeurs et d’anciens fumeurs qui était plus élevé dans le bras erlotinib (54 vs 42%). Avec une durée médiane de suivi de 36,3 mois, 140 événements de PFS ont été rapportés, 72 dans le bras standard et 68 dans le bras expérimental. Les principaux résultats de survie sans progression et de survie globale sont résumés sur  le tableau ci-dessous :   

 

Erlotinib

Erlotinib + Bevacizumab

p

PFS médiane des investigateurs (95% CI) (mois)

9,6 (8,2-10,6)

15,4 (12,2-18,6)

 

HR PFS des investigateurs (95% CI)

0,66 (0,47-0,92)

0,015

PFS médiane comité indépendant (95% CI) (mois)

9,6 (7,1-10,6)

14,7 (12-18,3)

0,016

Survie médiane (95% CI) (mois) 

22,8 (18,3-33)

33,3 24,3-45,1)

 

HR de survie (95% CI)

0,72 (0,47-1,10)

0,13

Les taux de réponse différaient dans les deux groupes : 50 % dans le bras standard et 70 % dans les bras expérimental, qu’il s’agisse des investigateurs ou de la lecture centralisée. 

Dans une analyse de sous-groupes, il a été montré que les fumeurs et anciens fumeurs qui recevaient du bevacizumab avaient non seulement une significativement plus longue PFS (16,9 vs 8,8 mois)  mais aussi une  survie globale significativement supérieure (35,3 vs 19,7 mois, HR = 0,49 (0,28 –0,82)). 

Enfin, la plupart des patients (71 et 69%) ont reçu un traitement de deuxième ligne qui était chez 49% des patients du bras expérimental et 57% de ceux du bras standard de l’osimertinib.

Avec un taux de données manquantes comparable dans les deux groupes et de l’ordre de 25 %, le temps jusqu’à détérioration de la qualité de vie ne différé pas entre les deux groupes.

Les taux d’effets adverses sévères liés au traitement étaient respectivement dans le bras expérimental et dans le bras standard de 20% et 3%. Quatre décès ont été observés dans chacun des 2 bras, dont un seul, une hémorragie méningée, a été rapporté au traitement combiné. Enfin les taux d’effets adverses de grade ≥3 étaient respectivement dans le bras expérimental et dans le bras standard de 56 et 49%.

Cette étude positive sur ses objectifs principaux confirme en Europe les résultats de l’étude de phase III japonaise : l’association erlotinib et bevacizumab comparée au seul erlotinib prolonge significativement la survie sans progression. Si l’impact de ces résultats pour le pays qui ont accès à l’osimertinib est probablement nul, cet impact pourrait être non négligeable dans les pays qui n’ont pas accès à ce traitement. 

 

Reference

Addition of Bevacizumab to Erlotinib as First-Line Treatment of Patients With EGFR-Mutated Advanced Nonsquamous NSCLC: The BEVERLY Multicenter Randomized Phase 3 Trial 

Piccirillo MC, Bonanno L, Garassino MC, Esposito G, Dazzi C, Cavanna L, Burgio MA, Rosetti F, Rizzato S, Morgillo F, Cinieri S, Veccia A, Papi M, Tonini G, Gebbia V, Ricciardi S, Pozzessere D, Ferro A, Proto C, Costanzo R, D'Arcangelo M, Proietto M, Gargiulo P, Di Liello R, Arenare L, De Marinis F, Crinò L, Ciardiello F, Normanno N, Gallo C, Perrone F, Gridelli C, Morabito A.. 

J Thorac Oncol 2022; 17 : 1086-1097.

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