Lancet oncology

L’analyse protéomique peut-elle guider le choix de la deuxième ligne ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
juillet 2014

Thérapeutique ciblée, Biomarqueurs / Facteurs pronostiques et/ou prédictifs

Si l’action des inhibiteurs de la tyrosine kinase  de l’EGFR chez les patients qui présentent une mutation activatrice de l’EGFR est parfaitement démontrée ce qui a conduit à faire du gefitinib, de l’erlotinib et maintenant de l’afatinib le traitement standard de première ligne chez les patients mutés, si l’action de l’erlotinib  chez les non mutés est également bien établie depuis l ‘étude BR21, son efficacité comparée à celle d’une chimiothérapie de deuxième ligne reste l’objet d‘un débat qui a été fréquemment abordé dans notre site (/des-arguments-forts-en-faveur-de-la-reduction-des-metastases-par-les-beta-bloquants, /bevacizumab-et-paclitaxel-en-quatrieme-ligne-et-plus, /gynecomastie-et-galactorrhee-reversibles-sous-chimiotherapie-au-cours-dun-cancer, /les-femmes-dont-le-tabagisme-est-eleve-ont-elles-un-risque-de-cancer-broncho, /prev-em-onco/3633).

Un travail, publié dans le prestigieux J Natl Cancer Inst en 2007 (http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/17551144) , avait montré que l’analyse du profil protéique du sérum par spectrométrie de masse effectuée chez des patients traités par inhibiteurs de la tyrosine kinase  de l’EGFR était susceptible de différencier des patients à bon ou mauvais pronostic. Ce test est maintenant commercialisé sous le nom de VériStrat et permet de classer les sérums analysés en « bons » ou « mauvais » pronostic.

Néanmoins, ces données étaient issues d’études rétrospectives et le but de l’essai de phase III multicentrique italien PROSE rapporté ici est de savoir si ce test peut on non avoir une valeur prédictive de l’efficacité de l’erlotinib ou d’une chimiothérapie.

Pour être éligibles, les patients devaient avoir un cancer bronchique non à petites cellules de stade avancé et avoir progressé après une première chimiothérapie à base de platine. Le sérum testé pour l’analyse protéomique était prélevé au moment de la randomisation qui était effectuée entre soit erlotinib, soit chimiothérapie (pemetrexed ou docetaxel). L’objectif principal était la survie globale.

En 4 ans 285 patients ont été inclus par 14 centres italiens dont 263 étaient éligibles : 129 dans le groupe chimiothérapie (74 docetaxel et 55 pemetrexed) et 134 dans le groupe erlotinib. Trois patients qui présentaient une violation majeure du protocole et 19 qui n’ont pas pris de traitement ont été exclus de l’analyse. Quatorze sur 192 patients avaient une mutation activatrice de l’EGFR (5% de l’ensemble des patients).

Les caractéristiques cliniques des patients des 2 groupes étaient comparables à l’exception de l’histologie : il y avait plus de cancers épidermoïdes chez les patients traités par erlotinib.

Parmi les 263 patients, 184 (70%) avaient une analyse protéomique classée « bonne » et 79 classée « mauvaise ». Les analyses classées « bonnes » étaient associées avec un bon PS et un sexe féminin.

Résultats

Avec un suivi médian supérieur à 32 mois, aucune différence significative de survie globale n’a été notée entre les patients traités par erlotinib et ceux traités par chimiothérapie (respectivement 7,7  vs 9 mois). La PFS en analyse ajustée était en revanche meilleure chez les patients traités par chimiothérapie.

La médiane de survie était très différente entre les deux groupes de patients dont l’analyse protéomique était classée « bonne » et ceux pour les quelles elle était « mauvaise » (11 vs 3,7 mois). 

Il existait une interaction significative entre la classification issue de la protéomique et le traitement, même après ajustement avec le statut EGFR : dans le groupe classé « bon », il n’y avait  pas de différence de survie. En revanche dans le groupe classé « mauvais » la chimiothérapie a une activité supérieure à celle de l’erlotinib (tableau ci-dessous)

 

Médiane de survie (mois)

p

 

Chimiothérapie

Erlotinib

 

« Bonne » protéomique :

10,9

11

0,7

« Mauvaise » protéomique :

3

6,4

0,022

Il n’y avait en revanche pas d’effet significatif de cette classification sur la PFS.

A noter que respectivement 59% et 49% des patients du groupe chimiothérapie et du groupe erlotinib n’ont pas reçu de traitement de troisième ligne et que 26% des patients du groupe chimiothérapie ont reçu en troisième ligne de l’erlotinib et 49% du groupe erlotinib ont reçu de la chimiothérapie.

Es effets adverses possiblement liés au traitement sont survenus dans une proportion à peu près égale. Il s’agissait de façon attendue  de neutropénies, de  nausées, de neuropathies, d’alopécies, et d’asthénie chez ceux qui avaient reçu une chimiothérapie et de rash et de diarrhées avec l’erlotinib.

Cette étude est particulièrement intéressante car elle a  identifié un groupe de patients, ceux dont on sait après une simple analyse sérique qu’ils ont une  « mauvaise » protéomique,   qui en deuxième ligne bénéficient davantage de la chimiothérapie que de l’erlotinib. Pour les autres patients le choix entre chimiothérapie et erlotinib  resterait ouvert. 

Reference

Predictive value of a proteomic signature in patients with non-small-cell lung cancer treated with second-line erlotinib or chemotherapy (PROSE): a biomarker-stratified, randomised phase 3 trial.

Gregorc V, Novello S, Lazzari C, Barni S, Aieta M, Mencoboni M, Grossi F, Pas TD, de Marinis F, Bearz A, Floriani I, Torri V, Bulotta A, Cattaneo A, Grigorieva J, Tsypin M, Roder J, Doglioni C, Levra MG, Petrelli F, Foti S, Viganò M, Bachi A, Roder H.

Lancet Oncol 2014; 15 : 713-21

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