European Respiratory Journal

Cancer et soins intensifs : une nouvelle étude prospective

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
octobre 2014

Qualité de vie / Soins palliatifs, Soins intensifs

L’admission des patients en soins intensifs est un sujet qui a été fréquemment abordé sur ce site (/lafatinib-est-il-actif-chez-les-patients-dont-la-tumeur-presente-des-mutations-non, /risque-de-cancer-broncho-pulmonaire-et-facteurs-socio-economiques-dans-le-voisinage, /qualite-de-vie-sous-afatinib, /la-meta-analyse-sur-leffet-du-bevacizumab-est-publiee, /prev-em-onco/3765). Voici à nouveau une étude prospective qui a été menée à Grenoble entre 2010 et 2012 et dans laquelle ont été inclus tous les patients qui, atteints de cancer broncho-pulmonaire, ont été admis au CHU pendant cette période avec au moins une défaillance d’organe.

Son but était de préciser les facteurs liés à une admission en soins intensifs.

Cette étude porte sur 140 patients, âgés en moyenne de 65 ans, dont 39% avaient un PS de 0 à 2. La grande majorité d’entre eux étaient métastatiques à l’inclusion et seulement 13% avaient une maladie jugée contrôlée.

Sur ces 140 patients, 91 (65%) n’ont pas été adressés à un réanimateur pour une admission en soins intensifs et 49 l’ont été. Trente six y ont finalement été admis.

Qu’est ce qui conduit à adresser un patient en soins intensifs ?

Quarante neuf de ces patients (35%) ont, eux mêmes  ou leur famille,  refusé l’admission en soins intensifs, ce qui représentait la principale cause de non admission.  Les autres facteurs indépendamment associés avec la proposition d’une admission en soins intensifs était le fait que la personne qui voyait le patient n’était pas un pneumo-oncologue, un PS≤2 et une maladie non progressive.

Qu’est ce qui conduit à ne pas admettre en soins intensifs  un patient qui y était adressé ?

Les principales raisons qui ont conduit à ne pas admettre en soins intensifs 13 patients qui y étaient adressés étaient l’extension tumorale, la sévérité du syndrome aigu motivant cette demande. L’admission était plus fréquente lorsque le patient ne venait pas de l’unité spécialisée d’oncologie pulmonaire.

Quel a été l’avenir des patients admis en réanimation ?

La moitié des patients (18/36) y sont décédés et 6 autres durant le séjour hospitalier qui suivait le séjour en USI.

Il est intéressant de prendre connaissance, sur le tableau ci dessous, des taux de survie à 10 jours et 3 mois selon la façon dont le patient a été pris en charge :

 

n

N de patients vivants à 10 jours (%)

N de patients vivants à 100 jours (%)

Adressés en réanimation et admis

36

18 (50)

9 (25)

Non adressés en réanimation

91

29 (32)

6 (6)

En analyse multivariée, l’admission en USI n’était pas associée à la survie à 100 jours ; seul le PS l’était.

Le quart des patients inclus dans cette étude (n=34) ont survécu à l’hospitalisation. Leur médiane de survie a été de 337 jours pour les patients admis en USI.

Dix neuf autres patients ont reçu, en dehors de l’USI  des « soins maximum », leur médiane de survie était de 58 jours. Seuls 3 des patients qui ont reçu des soins palliatifs ne sont pas morts pendant ce séjour hospitalier.  La médiane de survie de ces patients admis en USP était de 29 jours.

Cette étude est très intéressante sur plusieurs points. D’abord, c’est une étude prospective et beaucoup d’études sont rétrospectives. Ensuite elle montre bien l’effroyable gravité d’une telle situation clinique et la puissante valeur pronostique du PS précédant l’admission qui avait été déjà signalée dans une étude internationale (/qualite-de-vie-sous-afatinib). Enfin elle montre que la  décision peut être prise, sans que la présence du réanimateur soit nécessaire. On nous dit aussi  que le fait que la personne qui voyait le patient n’était pas un pneumo-oncologue était lié à d’avantage d’appels du réanimateur. Ce sont des données auxquelles  on pouvait s’attendre puisque la décision est surtout basée sur la connaissance qu’a le médecin du malade et de sa maladie. Cette connaissance,  c’est bien le médecin qui a en charge le patient qui l’a le plus et qui doit avoir une part 

Reference

Selection criteria for intensive care unit referral of lung cancer patients: a pilot study.

Toffart AC1, Pizarro CA2, Schwebel C3, Sakhri L4, Minet C5, Duruisseaux M6, Azoulay E7, Moro-Sibilot D8, Timsit JF9.

Eur Respir J 2014 Oct 16. pii: erj01181-2014. [Epub ahead of print]

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