Lancet oncology

Immunochimiothérapie néoadjuvante : une étude de phase II

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
mai 2020

Traitement péri-opératoire, Chirurgie

Administrer l’immunothérapie avant l’intervention est peut-être plus efficace que de l’administrer après puisque les néoantigènes tumoraux ciblés par l’immunothérapie sont encore présents. De plus, explorer un nouveau  traitement en néoadjuvant permet d’apprécier beaucoup plus vite son efficacité que de l’explorer un adjuvant si on considère que  la réponse histologique est prédictive de la survie (cliquer ici). Nous avons commenté sur ce site les premiers résultats obtenus par l’immunothérapie néoadjuvante utilisée pour le traitement des cancers bronchiques non à petites cellules opérables.  Ces premiers résultats qui étaient très encourageants (cliquer ici) ont conduit  à l’ouverture de plusieurs essais comparables et l’IFCT a pris une part importante dans cette recherche avec l’étude IFCT IONESCO dont les résultats vont être communiqués à l’automne prochain. 

Dans le même temps, l’efficacité de l’immunochimiothérapie était démontrée d’abord avec le pembrolizumab dans les cancers non épidermoïdes (cliquer ici) et épidermoïdes (cliquer ici) puis avec l’atezolizumab (cliquer ici)  et (ici)

Dans ce contexte, il était donc logique d’explorer l’efficacité de l’immunochimiothérapie néoadjuvante et le Lancet Oncology vient de publier les résultats du premier essai concernant cette association. 

C’est une étude ouverte de phase II à promotion industrielle qui a été conçue et réalisée dans trois grands centres américains. 

Pour être éligibles, les patients devaient avoir un cancer bronchique non à petites cellules de stade IB à IIIA jugé résécable (l’évaluation histologique du médiastin n’était pas exigée), un PS à 0 ou I, au moins une lésion mesurable, être fumeurs ou anciens fumeurs et ne pas avoir de contre-indication à l’immunothérapie. Ils recevaient toutes les 3 semaines :

  • 1200 mg à J1 d’atezolizumab,
  • Nab-paclitaxel (choisi pour éviter la prémédication par corticoïdes) à 100 mg/m2 aux J1, 8 et 15,
  • Et carboplatine AUC 6 ramenée à 5 après un amendement à J1.

Un scanner était effectué après les 2 premiers cycles et en cas de progression le patient était directement adressé au chirurgien. Sinon, deux autres cycles étaient administrés.  

Avant la chirurgie un nouveau scanner était réalisé et les patients étaient opérés 4 semaines après la dernière dose de traitement néoadjuvant. La réponse pathologique majeure (moins de 10% de tumeur viable résiduelle après examen de la totalité du lit tumoral) était appréciée par l’anatomopathologiste local. 

L'objectif principal était la proportion de patients qui avaient une réponse pathologique majeure. L’hypothèse était que l’addition d’atezolizumab à la chimiothérapie pourrait augmenter le taux de réponses pathologiques majeures de 22 à 44%. Un plan à 2 étapes de Simon était utilisé : lors de la première étape, 18 patients étaient enrôlés et si 4 patients ou moins présentaient une réponse pathologique majeure l’étude était interrompue. La deuxième étape prévoyait l’inclusion de 12 patients supplémentaires.   Les objectifs secondaires étaient le taux de réponse, la survie sans maladie, la survie globale. 

Trente patients ont été inclus de mai 2016 à mars 2019. Parmi ceux-ci, 17 avaient un adénocarcinome, 12 un cancer épidermoïde et 1 un carcinome neuroendocrine à grandes cellules. Seize patients exprimaient PD-L1  à au moins 1% et 8 à au moins 50%. Vingt-trois patients (77%) avaient un cancer de stade IIIA selon la septième classification. 

Presque tous les patients (n=29) ont été opérés et 26 (87%) avaient une résection R0 (12 par vidéochirurgie et 14 par thoracotomie).  Les interventions rélisées chez les 26 R0 ont été le plus souvent des lobectomies (n=19) ; il y 4 bilobectomies et 3 pneumonecomies. Les 4 patients qui n’ont pas été classés R0 l’ont été à la suite d’une thoracotomie exploratrice (n=3) ou du développement de métastases cérébrales durant le traitement d’induction. Le délai médian entre l’administration du dernier traitement et la chirurgie était de 25,5 jours.

Un patient (3%) est mort dans les 30 jours post-opératoires d’une pneumopathie et aucun entre 30 et 90 jours. Le séjour hospitalier a duré en moyenne 4 (3-6) jours et 1 seul patient a été réadmis dans les 30 jours. Aucune complication post-opératoire n’a été attribuée au traitement néoadjuvant. 

Dix sept des 30 patients (57%) ont eu une réponse pathologique majeure et 10 (33%) une réponse complète histologique. Il n’y avait pas de lien entre la réponse pathologique majeure et la réponse complète d’une part et le statut PD-L1 d’autre part. Il existait un lien entre la réponse pathologique majeure et la réponse clinique (19 (63%) réponses selon RECIST ). 

Avec un suivi médian de 12,9 mois, 19 (63%) des 30 patients et sont vivants, 2 ont progressé pendant le traitement et 9 (30%) ont eu une récidive. 

La survie sans maladie médiane était de 17,9 mois et la médiane de survie n’était pas atteinte. 

Les évènements secondaires rapportés au traitement les plus fréquents étaient la neutropénie (87%, dont 50% de grade 3/4 et une neutropénie fébrile), l’anémie (77%), la thrombopénie (63%, dont 7% de grade 3/4), la fatigue (57%), l’alopécie (47%) et les nausées (43%). Les possibles évènements secondaires immunologiques  étaient peu nombreux (arthralgie, myalgie, diarrhée, hypothyroidie, hyperglycémie, augmentation des transaminases). Aucun décès attribuable au traitement n’a été observé.

Des analyses complémentaires (post-hoc) ont été réalisées dont on retient :

  • Parmi les 19 patients classés N2 (dont 12 étaient histologiquement confirmés), 11 ont été pN0 (7 des 12 prouvés) et 2 pN1. 
  • La survie sans maladie médiane des patients qui avaient une réponse pathologique majeure était de 34,5 mois comparée à 14,3 mois chez ceux qui n’en avaient pas. 

Cet essai d’immunochimiothérapie néoadjuvante est le premier essai publié. Ses résultats sont particulièrement encourageants même s’ils portent sur des malades probablement très sélectionnés puisque seulement 30 patients ont été inclus en 3 ans par 3 grands centres américains, ce qui représente 3 à 4 patients par centre et par an … Plusieurs autres études de phase II sont en cours. Une importante  étude de phase III randomisée compare nivolumab et chimiothérapie à placebo et chimiothérapie chez 452 patients atteints de cancer bronchique non à petites cellules de stade II-IIIB résécable (cliquer ici)

    

 

 

 

Reference

Neoadjuvant atezolizumab and chemotherapy in patients with resectable non-small-cell lungcancer: an open-label, multicentre, single-arm, phase 2 trial.

Shu CA, Gainor JF, Awad MM, Chiuzan C, Grigg CM, Pabani A, Garofano RF, Stoopler MB, Cheng SK, White A, Lanuti M, D'Ovidio F, Bacchetta M, Sonett JR, Saqi A, Rizvi NA.

Lancet Oncol 2020 May 7. [Epub ahead of print]

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